De Hanno Ben Ahirom à Yoékim Romanos

Jad Abdallah
5 min readJun 19, 2020

Extrait d’une histoire que j’écris (non corrigé, non édité)

Il faisait chaud le jour où on mit trois balles dans sa tête.. une chaleur d’enfer…même dans l’église.. Joseph le boucher sentait le poisson. Et pendant que Père Antoun prononçait les premiers mots de Matthieu 25:31–46 on entendit les bruits de tirs… trois coups de feu… on acheva sa descendance. Le Flambeur n’avait pas d’enfants.. Et puis il parlait peu pour que je comprenne.. lui c’est le genre qui fait.. il parle peu tu vois.. meme son père on l’avait assassiné de la même manière.. durant le carême de Paques.. mais il parlait peu c’est ca..

Tu es ce que tu fais il disait. Tu fais donc tu es. Si tu ne fais pas, guère tu ne sera… Ainsi les ancêtres du Flambeur ont navigué les vagues. En été. Mais aussi en hiver. Puisque pour faire il n’y a pas de saison. Faut être libre pour le comprendre.. Puisque moi je ne comprenais pas d’abord…Et pour être libre il faut faire. Essayer et faire. Comme Le Flambeur…. Et les ancêtres du Flambeur. Moi je les connais tous ces gens-là. Il avait minutieusement copié la liste de leur noms. Un après l’autre. De père à fils. Cette tradition ne devait pas mourir. Lui il a copié le nom de son père lequel a inscrit le nom de son propre père suivi de sa date de décès. Et puisque la descendance du Flambeur creva avec lui il ne resta personne pour inscrire l’année de son décès. Je l’ai fait moi même. Yoékim Romanos Eben Boulos Romanos — 1999. Lorsque mon encre sécha, mes larmes coulèrent. Comme le torrent qui frappe sur les rochers de Qodish. Et voila. C’est tout.

Mon encre annonça la fin de la descendance du Flambeur. Mais suffit-il qu’une personne crève pour que meure avec elle toute son histoire? Les ancêtres du Flambeur, navigateurs, commerçants et architectes sont-il vraiment morts? N’est-il vrai que chaque village perché sur un sommet porte leur traces? Les mélodies de la Méditerranée qu’emporte le vent ne frappent-elles pas les somptueux massifs rocheux de nos montagnes? Le pin, le cyprès et les genévriers murmurent toujours leurs histoires. Les noms des villages chantent leur accent. Le sourire des jeunes filles de ces célestes collines porte leur mystère.

Avec soin j’ai d’abord recopié la liste des ancêtres de Yoakim depuis 270 Avant J.C jusqu’à 1110… les quelques années après la première croisade..

Hanno Ben Ahirom -330. Crucifié par les Macédoniens.

Bodeshmun Ben Hanno -270. Etabli à Sidon, ensuite à Carthage.

Sakrbaal Ben Bodeshmun -225. Tué en Espagne par les Romains.

Aderbaal Ben Sakrbaal -183. Etabli à Sidon.

Yehomilk Ben Aderbaal -149. Etabli à Carthage. Tué par Scipion.

Baaliaton Ben Yehomilk -122. Commerçant, Sicile.

Hamilcar Ben Baaliaton -87. Commerçant, Sicile.

Hasdrubal Ben Hamilcar -34. Commerçant, Tyre.

Hanno Ben Hasdrubaal -2. Commerçant, Tyre.

Backhos Ben Hanno 56. Christianisé, Tyre.

Cadmus Ben Bakhos 104. Assassiné.

Chryseis Ben Cadmus 158. Etabli à Athènes.

Haemon Ben Chryseis 202. Commerce de chevaux.

Maximus Ben Haemon 267. Commerce de chevaux.

Thaddeus Ben Maximus 338. Disparu en mer.

Constantine Ben Thaeddeus 378. Etabli à Constantinople.

Josephus Ben Constantine 422. Architecte.

Vitus Ben Josephus 478. Architecte.

Asylaion Ben Vitus 512. Commerce d’huile, de légumes.

Backhos Ben Asylaion 576. Commerce d’huile, de bois.

Romanus Ben Backhos 606. Architecte.

Isaac Ben Romanus 655. Tué par les Perses.

Justinius Ben Isaac 712. Tué par les Perses.

Theodore Ben Justinius 748. Etabli à Carthage. Commerce de verre, bois.

Theodosius Ben Theodore 792. Commerce de verre, bois, soie. Empoisonné.

Theophanes Ben Theodosius 833. Commerce de verre, bois, soie, céramique.

Zacharias Ben Theophanes 865. Poignardé.

Zeno Ben Zacharias 899. Orateur.

Antonios Ben Zeno 938. Commerce de blé, de poisson, de légumes.

Zeno ben Zeno 977. Médecin.

Haemon ben Zeno 1004. Médecin.

Romanos Ben Haemon 1056. Militaire.

Mikhael Ben Romanos 1078. Militaire

Romanos Ben Romanos 1110. Parti avec les croisés. Mont Liban.

La liste s’arrête la. Y-avait il une suite? Je ne savais pas. Je n’avais pas le temps de fouiller. Il fallait partir. Si la mère d’Antonio Rouge me repère, cette vache, tout le village sera au courant. J’attendis qu’elle commence à faire réciter les cours au petit Barbar. Barbar c’est le petit frère d’Antonio Rouge. Il était un vrai lent ce Barbar. Il faisait gonfler sa mère lorsqu’il récite un passage du “Petit Prince”. Elle beuglait et l’insultait. “Je chasse les hommes. Les poules me chassent” répétait le petit con. Et elle hurlait.. “Je chasse les poules. Les hommes me chassent!! Tu les connais ces poules du vagin de ta mère!? Répète ya ebn l charmouta!” .. suivi d’une gifle bien administrée.. Je profitais de le lenteur du petit Barbar pour filer vite vers le champs de pomme avant qu’elle ne m’aperçoive du balcon.

Je m’assis sous l’un des pins du Flambeur. Je relis les noms. Chaque nom éveille en toi une senteur de sel de mer. Il existe de ces endroits qui te font rêver. Depuis ton enfance. Tu portes ces rêves avec toi. De génération en génération. Même quand les années ajoutées font de toi une brute. Comme ses terres d’oliviers jusqu’à l’horizon que je contemplai de la fenêtre de classe au printemps. Mais aussi en été lorsque les vallées de pins et de cyprès plongent dans une lumière jaune claire et un parfum de thym. Et ces endroits n‘existent qu’en Méditerranée. La mer des mers. Là où les Dieux naissent et les légendes s’enterrent.

Plus le printemps approche… plus devient abondante l’arôme de ces prairies qui nous enveloppaient. Les examens approchaient avec le printemps… moi je rêvais. A l’école on appelait ma grande-mère au début de chaque printemps pour lui dire que son petit fils est lent. Pensif. Mais ma grand-mère le savait. Et malgré tout elle faisait ces deux kilomètres à pied pour justifier ma lenteur. Elle venait à temps. Ces fils de pute lui faisaient attendre. Ça m’énervait moi. Ces bobos qui ne changeait de débardeurs qu’une fois par trimestre. Mais ma grand-mère leur expliquait que je vais faire des efforts et tout. Moi ça m’énervait que personne en classe ne rêvait avec les oliviers. Sauf Antonio Rouge. Antonio Rouge lui il s’en foutait. On appelait sa mère. Elle ne venait jamais. Il dessinait des animaux bizarres avec deux têtes et trois seins. Des chameaux avec des ailes et deux bites et tout…

Les oliviers s’étendaient jusqu’à l’horizon. Des oliviers qui couvraient tout ce que l’oeil pouvait voir. Ceux qui avaient le gout de le liberté laissaient leur regard et leurs pensées fondre avec le paysage, les feuilles et l’argile. Les autres, les phobiques eux ils écoutaient ce que disait le prof. Et pire, quelques uns levaient le doigt. Faut être un abruti pour lever son doigt. Si tu es libre tu ne lèves pas ton doigt. Tu dis les choses comme elles sont… Et ces champs d’oliviers et ces mers.. plus ils s’étendaient plus les aïeux du Flambeur s’éloignaient.. plus ils risquaient leur vie moins j’espérais trouver la suite des noms..

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Jad Abdallah

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